mardi 9 juillet 2013

La documentaliste et les données : Protéger pourquoi ? (1/3)

Protéger ses données ou non, n'est pas un acte anodin. C'est un choix de chacun. Néanmoins, nous sommes très mal formés et informés sur cette question.

Le premier point à savoir est que ce n'est pas la "faute du système". C'est une raison qui est souvent invoquée, mais comment reprocher à l'école ou l'université de ne pas nous avoir formé à quelque chose qui n'existait pas encore ? Mais, et c'est là qu'est tout l'ambiguïté, alors que les éléments problématiques existent depuis longtemps maintenant, nous ne formons pas plus.
Le second point est que malgré ce que beaucoup de personnes pensent, cela concerne tout le monde. Ce n'est pas juste l'apanage des grandes sociétés ou des personnes riches et célèbres. La protection des données devraient être une priorité pour tout le monde.

Commençons donc par le début : qu'est-ce qu'une donnée ?


Une donnée, c'est approximativement n'importe quelle information qui n'est pas logiquement déductible. Je m'explique. Je peux affirmer sans aucun risque que toutes les personnes qui vont me lire sont nées d'un homme et d'une femme. Ce n'est pas une donnée. C'est un fait scientifique. Je peux aussi affirmer sans trop de risque que la large majorité de ces parents ont eu des relations sexuelles. Ce n'est toujours pas une donnée. C'est de la logique. Actuellement, les enfants issus de FIV sont très minoritaires. Poussons un peu la chose, je peux affirmer qu'une large majorité des personnes qui me lisent ont été conçues dans un lit et non pas sur la table de la cuisine. C'est toujours de la logique (et pour cela, je vous renvoie aux statistiques des préférences sexuelles des français que publient régulièrement magazines féminins et masculins).

Par contre, quel moyen aurais-je d'affirmer que mon lecteur Pierre Bidule a été conçu sur la banquette arrière d'une Ford de 1967, alors que ses parents tentaient la position de l'amazone ? Aucun. Et là, c'est une donnée. L'exemple sexuel marche généralement très bien sur la distinction entre une connaissance générale et une donnée.
Une donnée, dans le contexte qui nous intéresse, c'est avant tout quelque chose que les autres ne savent pas rationnellement.

Mais, pourquoi faut-il protéger ses données ?


En effet, la question se pose : quel est mon intérêt personnel à les protéger, à agir pour le faire ?
Pour moi -et pour un certain nombre de mes collègues des métiers de l'information- la réponse est simple : des personnes se servent de vos données si vous ne les protégez pas. Auriez-vous réellement envie que n'importe qui sache tout sur vous ?
Un exemple très simple. Pierre Bidule, toujours, est acheteur de livres électroniques. C'est un homme qui est bien dans sa peau et lit des romans érotiques de temps en temps. Vous me direz, cela n'a jamais tué personne. Seulement, Pierre Bidule achète les ouvrages qui lui plaisent et, ne vous en déplaise, il aime les histoires SM où l'homme se soumet à un autre homme. Sauf que Pierre Bidule ne protège pas ses données et en tapant son nom dans Google, n'importe qui peut le découvrir.

Mon exemple est un peu extrême, mais pas improbable. Par exemple, les utilisateurs d'Amazon peuvent créer des listes d'ouvrages qu'ils désirent visibles par tous associés... au nom d'utilisateur qu'ils ont choisi.
Protéger ses données, c'est avant tout protéger son intimité. S'assurer que ses informations qui nous sont propres ne soient pas librement divulguées par tout un chacun.

Bon, d'accord, mais on les protège contre qui ces données ?


Ces données, on les protège premièrement contre les entreprises privées. Toutes ces petites informations sur vous ont beaucoup de valeur pour elles. Elles leur permettent de cibler au mieux leurs envois en mailing ou leurs appels. En effet, cela leur permet de ne pas dépenser de l'argent (timbre, enveloppe) ou des ressources humaines (personne qui appelle) pour des personnes qui n'ont aucun intérêt dans leur produit.
Pour reprendre mes exemples sexuels, cela permet d'éviter d'écrire ou d'appeler un couvent entier de nonnes pour leur proposer d'acheter le dernier super sex-toy et de se concentrer par exemple sur les chroniqueuses des rubriques "sexo" des magazines féminins.

Beaucoup s'insurgent contre ces techniques, ces listings. Fondamentalement, je ne suis pas contre. Une entreprise est là pour faire un bénéfice. Elle n'est pas là pour couler financièrement. Mais, et là, je suis aussi très claire dans ma position, une entreprise n'a pas le droit d'être en porte-à-faux avec la loi. Cela signifie purement et simplement que je suis opposées aux listings créés sans que le client ne soit mis au courant. Et c'est pourtant une pratique très courante.
Cela d'autant plus que beaucoup d'entreprises vendent leurs listings. Cela fait que vous avez dit à la Société Machin-Alimentaire que vous êtes allergique au gluten, mais quand elle vendra -sans vous prévenir- son fichier à la Société TrucChouette-Banque, eux aussi auront cette information. Ainsi que la Société Tombouctout-Voyage à qui la Société TrucChouette-Banque le vendra dans trois mois. Ainsi de suite.

Je pense que vous comprenez maintenant pourquoi est-ce qu'il est très important de faire attention aux informations que l'on donne. En effet, bien souvent, on ne parle pas de notre allergie, mais plutôt de nos revenus annuels, du type d'appareils électroniques que nous avons, des crédits que nous prévoyons, ...

Néanmoins, il existe un autre danger. Les voleurs. Il y a ceux qui se servent de Facebook pour savoir où vous habitez et quand vous êtes absent pour s'introduire chez vous. Et il y a un autre genre. Les usurpateurs d'identité. Plus vous donnerez d'informations sur vous et plus il sera simple pour votre usurpateur de se faire passer pour vous.
Et sachez qu'il est très très complexe de faire cesser une usurpation d'identité, mais aussi de faire reconnaître le préjudice causé, car bien souvent, l'usurpateur s'est servi de votre nom pour des emprunts, des achats, des P.V.s, ... et que vous devez rembourser cela vous-même.

Les deux autres parties à venir :

- Comment éduquer et comment se protéger ?
- Deux exemples concrets : Facebook et Hadopi.

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